se trouve un arbre, lequel porte fueilles semblables à celles de noz figuiers, le fruit est long de deux pieds ou environ, & gros en proportion, approchant des grosses & longues coucourdes de l'isle de Cypre. Aucuns mangent de ces fruits, comme nous faisons de sucrins & melons ; et au-dedans de ce fruit est une graine faite à la semblance d'un rognon de lievre, de la grosseur d'une fèbve.
Quelques-uns en nourissent les singes, les autres en font colliers pour mettre au col ; car cela est fort beau quand il est sec & assaisonné.
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[Sénégal] … des palmiers & du vin & bruvage que les Sauvages noirs ont appris d'en faire, lequel en leur langue ils appellent, Mignol.
emprunté à Alvise Ca' da Mosto, Navigatio ad terras incognitas, 1532 (Voyages en Afrique noire, 1455 et 1456), ch. XXVI, p. 24 : succus appellatur mignol.
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L'arbre ouvert avec quelque instrument, comme à mettre le poin, à un pied ou deux de terre, il en sort une liqueur, qu'ils reçoivent en un vaisseau de terre de la hauteur de l'ouverture, & la reservent en autres vaisseaux pour leur usage.
Et pour la garder de corruption, ils la salent quelque peu, comme nous faisons le verjus par deça : tellement que le sel consume ceste humidité cruë estant en cette liqueur, laquelle autrement ne se pouvant cuire ou meurir, nécessairement se corromprait. Quant à la couleur & consistance, elle est semblable aux vins blancs de Champagne & d'Anjou ; le goust fort bon et meilleur que les citres de Bretagne. Ceste liqueur est tres propre pour refreschir et desalterer, à quoy ils sont subjets pour la con-
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tinuelle & excessive chaleur. Le fruict de ces palmiers, sont petites dattes, aspres et aigres, tellement qu'il n'est facile d'en manger : néantmoins que le jus de l'arbre ne laisse à estre fort plaisant à boire ; aussi en font estime entre eux, comme nous faisons des bons vins.